A tale of two sisters, un film et tant d'interprétations possibles

장화 홍련 aussi connu sous le nom "A tale of two sisters" mais surement plus ainsi "Deux Soeurs".
Est un film coréen, une petite pépite comme on aimerait en avoir plus souvent. J'étais encore lycéen à sa sortie et je me rappelle combien j'ai été surpris par ce film. Un côté un peu fantastique, penchant vers l'horreur, mais surtout étouffant. Le tout servit par un traitement des images qui nous prend à contre pied. L'ambiance semble chaleureuse et froide à la fois, on se sent autant en sécurité dans cette maison familiale que dans la maison des 1000 morts du bon "Capitaine Spaulding". Pensant obtenir un plaisir simple et un frisson immédiat je me lançait dans l'aventure...
un des rares moments de douceur
Sortie en 2003 en Corée du Sud, nous avons eu la chance de voir le film en juin 2004 accompagné une interdiction aux moins de 12 ans. Deuxième film traitant des dysfonctionnements dans les familles du réalisateur Kim Jee Woon, est difficilement classable, du fantastique, de l'horreur, du thriller... Il est à la fois tout cela et plus encore. S'inspirant de films comme "Créatures Celestes" de Peter Jackson ou bien de "Signes" de Night Shyamalan, "Deux Soeurs" tire aussi ses origines du compte traditionnel coréen "Jangwa et Hongryun" ("Rose et Fleur de Lotus"). Ce conte raconte l'histoire de deux soeurs victimes de leur belle mère, de vengeance et de rédemption. (c'est une version très très courte de ce conte qui est un classique au pays du matin calme, à tel point qu'il se verra adapter de nombreuses fois en séries mais aussi en films).  Le thème des dysfonctionnements dans les foyers coréens étant cher à notre réalisateur, il se permet de travailler ce problème sous l'angle horrifique après avoir manier avec brio l'humour noir dans son film précédent "The Quiet Family". Pour rajouter à notre inconfort, et surtout faire vibrer la corde sensible, Kim Jee Woon a demandé à ses acteurs (Im Su-jeong : Bae Su-mi / Moon Geun-young : Bae Su-yeon / Kim Kap-su : Bae Moo-hyeon / Yeom Jeong-a : Eun-joo / Lee Seung-bi : Mi-hee) de se baser sur l'émotion, n'hésitant pas à réunir, sur le plateau, toutes les conditions pour que les acteurs puissent jouer, la tristesse, la colère, la joie, etc...
Un plan pourtant classique mais...
Comme dans un huit clos, nous sentons la pression monter à chaque instants, ceci alors que la maison semble chaleureuse et que nous assistons (comme dans tout bon film d'horreur / fantastique) à des scènes du quotidien. Le tout saupoudré de la juste touche de malaise. Que ce soit des non-dits des détails visuels comme une porte fermée, un cadre photo, des clous... (oui je tente de ne pas vous spoiler mais à la vision du film vous comprendrez ^^). Tous les détails comptent, tant et si bien que la fin du film vous forcera à visionner à nouveau le film pour valider (ou non) votre propre théorie et quelque part votre compréhension de la proposition qui vous est faite. Si vous êtes des habitués de ce genre, vous l'aurez compris un des secrets réside dans la chronologie des évènements,  c'est avec un savoir faire indéniable que le film nous présente des morceaux d'explications de façon anachronique faisant alors appel à notre mémoire et notre observation pour lire entre les lignes et obtenir une vision plus profonde du film. Bien entendu, cela reste un divertissement et il est tout à fait possible de se laisser guider et d'apprécier le film en l'état (ce que j'ai fais lors de mon premier voyage). Mais la fin, titille obligatoirement tout spectateur un tant soit peu curieux en lui donnant l'impression qu'il est passé très loin du message principal. Si il est toujours possible d'expliquer la majorité des évènements de façon rationnelle, il restera une part d'ombre, de mystère et de malaise que seule la présence de fantôme pourra expliquer...
des jours heureux? en tout cas tout le monde était encore là
Le second moyen utilisé pour nous induire en erreur, c'est que le film tant à nous faire oublier que le récit qui nous est proposé est celui proposé par la jeune fille. On retrouve le schéma utilisé pour le film "Souvenir" (film faisant partie de "Trois histoires de l'au delà") à savoir la mise à jour des peurs, des secrets et de la cruauté dont peut faire preuve le genre humain. Mélangeant ce qui peut s'apparenter a de simples difficultés familiales, des éléments fantastiques, le réalisateur nous lance sur des fausses pistes, nous perd et nous laisse confus ne sachant plus si ce qui se déroule à l'écran est une vérité, la vérité, une hallucination ou une suggestion. Seule la relation entre les deux soeurs semble nous procurer un havre de paix, un répit, quelque chose de quasiment onirique tant l'alchimie entre les deux actrices est grande. Pour autant il ne faut pas oublier le formidable travail de Lee Byeong Woo  au niveau de la bande son. Il nous livre un thème remarquable, qui contribue à nous perdre, entre notes joyeuses et mélancoliques, il joue avec nos sentiments et nous pousse à la faute quand à la compréhension globale du film. Tout simplement, nous invitant à entrer dans l'intimité de cette famille en souffrance pour pouvoir mieux nous précipiter dans l'horreur de ses secrets.
Dans ce qui nous est présenté comme le retour à la maison de la grande soeur et de son combat pour protéger sa petite soeur de sa belle mère, le spectateur est amené à faire rapidement des choix de compréhension (causes naturelles ou surnaturelles) ce qui, peut amener à des ressentis totalement différents à la fin du film.

Souvent présenté comme un "Ring" de part sa structure qui mélange les genres, "Deux Soeurs" est critiqué pour la complexité de son scénario et l'aspect qui peut sembler brouillon comparé à son grand frère. Ne voulant pas vous gâcher le plaisir de découvrir le film et son intrigue je ne peux vous proposer mon avis et ma vision de l'histoire, si ce n'est que c'est une histoire qui prend pour cadre une famille au sein de laquelle le regret et le "et si..." est dans tous les esprits (morts et vivants). Je peux cependant en parler avec vous en commentaire si vous le désirez (ce serait même avec un grand plaisir).  Je vous invite en tout cas à découvrir ce film qui a remporté le prix du meilleur film au Festival International du film de Catalogne en 2003, celui du Festival du Screamfest la même année. Les prix du jury, du meilleur film, du meilleur réalisateur et de la meilleure actrice (Im Su Jeong pour son rôle de Su mi) en 2004 ainsi que les Grand Prix et Grand prix de la jeunesse au Festival du film fantastique de Gérardmer cette même année.








©LP'C
©DR

Commentaires

Laissez vous tenter par nos autres articles ^^